Hôpital privé d'Antony

Concentrés et mobilisés malgré le stress

La structure d’imagerie médicale de l’hôpital privé d’Antony a mis en place une filière dédiée aux patients COVID-19. Les 130 salariés, qui ont dû changer leurs habitudes et accompagner la réorganisation quasi quotidienne des activités, travaillent avec une grande concentration, en attendant une vague plus importante de patients infectés.

Le 27/03/20 à 16:00, mise à jour aujourd'hui à 15:06 Lecture 6 min.

Isaure de Beaurepaire, interne en dernier semestre de radiologie, interprète des scanners pour des patients suspects de COVID-19. © Benjamin Bassereau

D’abord, se laver les mains à l’aide d’eau et de savon. Bien lire les consignes. Protéger ses cheveux avec une charlotte. Prendre son temps. Mettre en place un masque chirurgical, des lunettes de protection, une surblouse et un tablier jetables. Enfin, enfiler ses gants. Dans le calme. Pour Emma Spinosi, manipulatrice radio au centre d’imagerie médicale de l’hôpital privé d’Antony (92), cette procédure est devenue une habitude lors de la prise en charge des patients au scanner. Ce 26 mars 2020 et depuis quelques jours, l’équipement sur lequel elle travaille est exclusivement dédié aux patients suspectés ou suivi pour le COVID-19.

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Emma Spinosi, manipulatrice radio, s'équipe de son matériel de protection avant d'accueillir un patient suspecté de COVID-19 au scanner. © B. B.

Tri des patients

« Ne vous inquiétez pas, c’est comme un examen normal. » Dans sa tenue digne d’un bloc opératoire, la manipulatrice, en première ligne dans le contexte de cette épidémie, accueille du mieux qu’elle peut une patiente externe de 50 ans, en évitant tout contact rapproché. Cette dernière se déshabille directement dans la salle d’examen. Elle a été adressée par son médecin pour une toux avec expectoration sanguinolente apyrétique. En arrivant à l’hôpital, elle est passée par le « tri » des patients et a été orientée vers le circuit COVID-19, notamment à cause d’une suspicion d’anosmie. Le protocole est bien rodé. « Il est sans injection, sauf lorsque l’on suspecte une embolie pulmonaire, précise Sébastien Durand, manipulateur radio et directeur adjoint de la structure. Nous avons créé un protocole dédié avec reconstruction spectrale sur le parenchyme pulmonaire, car elle pourrait présenter un intérêt. »

Protections plastiques

L’examen ne dure que quelques minutes. À la console, des protections en plastiques recouvrent les claviers et le dispositif d’injection de produit de contraste.

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Emma Spinosi, manipulatrice radio, fait passer un scanner à un patient suspecté de COVID-19. © B. B.

La suite est bien séquencée : « On désinfecte entre chaque patient et on patiente le temps que le produit agisse. » La salle est également aérée par l’ouverture des fenêtres. Pendant qu’Emma Spinosi change de tenue, direction l’une des salles d’interprétation. On y retrouve Isaure de Beaurepaire, qui termine son dernier semestre d’internat en radiologie d’ici un mois. Elle prend en charge le dossier de la patiente en toute autonomie, en s’appuyant sur le compte rendu structuré proposé par la Société française de radiologie.

« Le scanner est normal, conclut-elle. Toutefois, les dernières données indiquent que, dans les trois premiers jours, 56 % des scanners sont normaux alors que le COVID est présent. » La radiologue appelle un médecin pour discuter d’une demande de scanner dans un cadre oncologique. « Finalement, les précisions qu’il m’a apportées valident la demande d’examen », précise-t-elle, avant de montrer à l’écran des cas typiques de COVID-19, où l’on peut voir de nettes opacités en verre dépoli.

35 examens COVID

En quelques jours, l’interprétation de ces examens est devenue une habitude dans ce centre d’imagerie médicale. La veille, 35 examens scanographiques ont été réalisés pour suspicion de COVID-19, sur une cinquantaine de scanners. C’est la conséquence de la création d’une filière spécifique COVID. « Nous avons tout réorganisé en suivant les directives des tutelles », explique Grégoire Bornet, radiologue associé et gérant de la structure. Une IRM a été fermée et une salle de radiologie standard accueille un échographe pour les patients COVID. En parallèle, l’établissement assure également une filière « non COVID » : c’est la permanence des soins, avec une activité centrée sur l’oncologie et les urgences. D’ailleurs, suite à la réunion quotidienne de la cellule de crise, mise en place il y a deux semaines, le service des urgences est sur le point d’être réorganisé en deux filières lui aussi. L’imagerie médicale implantera, à cette occasion, une salle de radiologie « de campagne » au sein de la filière « non COVID » dans ce qui était jusqu’ici le secteur des consultations.

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À l’accueil, des protections en plexiglas ont été installées en urgence pour protéger le personnel. © B. B.

Nouvelles habitudes de travail

Patients, soignants, administratifs, vigiles : tout le monde au sein de l’établissement de santé porte un masque chirurgical. Chacun doit prendre de nouvelles habitudes au travail. « Il faut réapprendre les gestes d’hygiène », nous confirme Julien El Hachemi, manipulateur référent, qui tourne dans le service pour offrir une aide logistique aux différents collègues, téléphone à la main. À l’accueil, des protections en plexiglas ont été installées en urgence pour protéger le personnel. Ici, comme ailleurs, les premiers jours de l’épidémie ont rimé avec difficultés logistiques.

« La situation s’est améliorée au niveau du matériel de protection ; nous ne sommes pas sous tension pour le moment », explique Grégoire Bornet. Dans le bureau de Carole Moglia, la directrice de la structure, des boîtes de masques et du gel hydroalcoolique sont disponibles. Ils viennent à la fois de la dotation de l’État faite à l’hôpital et à des dons issus d’un réseau de connaissance. Après plusieurs vols, tout a été mis sous clé.

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« La situation s’est améliorée au niveau du matériel de protection ; nous ne sommes pas sous tension pour le moment », explique Grégoire Bornet. © B. B.

Stress inhabituel

Ce jeudi en fin de matinée, les urgences ne sont pas débordées. À la manière de ce qui se passe dans les rues, le service d’imagerie connaît un calme inhabituel. Chacun, derrière son masque, est à son poste, concentré. La secrétaire médicale à l’accueil des urgences, le radiologue en salle d’IRM, les manipulateurs au deuxième scanner. Pour Julien El Hachemi, cela ressemble à une répétition générale, en attendant la probable vague de nouveaux cas. Isaure de Beaurepaire, elle, constate un stress inhabituel : « Nous devons faire attention à tout ce qu’on fait, à tout ce qu’on touche. Malgré la diminution du nombre d’examens, nous sommes beaucoup plus fatigués. »

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« Les manipulateurs travaillent une semaine sur deux, mais les radiologues ont décidé dès le premier jour de maintenir leur niveau de salaire », précise Sébastien Durand. © B. B.

Deux personnels administratifs ont été testés positifs au COVID-19. Mais cela n’explique pas le peu de monde dans le service. C’est que la crise sanitaire en provoque une autre, moins visible. « Habituellement, nous prenons en charge environ 800 patients par jour. L’activité s’est effondrée, avec une baisse de près de 80 % », déplore Grégoire Bornet. Dans ce contexte exceptionnel, il a fallu réorganiser les plannings des 130 salariés que compte la structure d’imagerie médicale. Les 16 médecins radiologues associés ont dû mettre au chômage partiel une grande partie du personnel. « Les manipulateurs travaillent une semaine sur deux, mais les radiologues ont décidé dès le premier jour de maintenir leur niveau de salaire », précise Sébastien Durand. Pour soutenir les équipes, Grégoire Bornet, en bon capitaine, promeut la communication, l’information et l’éducation : « Tous les soignants sont admirables, dignes, responsables et courageux. Pour le moment, on se concentre sur la crise sanitaire. »

Auteurs

Carla Ferrand

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