Neurosciences

La course d’endurance à haut niveau transforme le cerveau

Une étude américaine montre que la pratique de la course d’endurance à très haut niveau a des effets sur la connectivité au repos de certains réseaux du cerveau associés à la motricité mais aussi aux fonctions cognitives. Cette découverte pourrait être exploitée dans la recherche sur le vieillissement du cerveau et les maladies neurodégénératives.

Le 05/01/17 à 16:00, mise à jour aujourd'hui à 15:24 Lecture 3 min.

Des chercheurs de l’université d’Arizona ont constaté que les connections fonctionnelles du cerveau au repos sont plus développées chez les jeunes adultes coureurs de fond. CC0 domaine public pixabay.com

Courir de façon intensive aurait des effets bénéfiques sur le cerveau. Une équipe de l’université d’Arizona, à Tucson, aux États-Unis, a découvert que la connectivité fonctionnelle du cerveau au repos est différente chez les jeunes athlètes coureurs de fond.

L’endurance semble mobiliser de multiples fonctions du cerveau

Comme le rappellent David A. Raichlen et ses confrères dans la revue Frontier in Human Neurosciences [1], la recherche a montré que l’entraînement assidu à des activités qui demandent une coordination motrice précise – la musique par exemple – peut être lié à des transformations dans les zones cérébrales responsables des fonctions motrices et dans les régions du cortex impliquées dans la perception sensorielle, spatiale et dans l’attention. De même, écrivent-ils, « des travaux récents démontrent que la pratique experte de sports qui demandent une grande coordination main-œil peut avoir des effets similaires. » En revanche, « peu d’études se sont intéressées aux effets d’activités sportives qui n’exigent pas de capacités motrices fines, comme l’endurance ». Parmi les travaux sur le sujet, ceux de Yogev-Seligmann et coll. [2], observent que la locomotion semble mobiliser de multiples fonctions cognitives, comme la planification, l’inhibition, la surveillance, la commutation attentionnelle, etc.

22 jeunes hommes ont passé des examens d’IRM fonctionnelle

David A. Raichlen et ses confrères ont voulu en avoir le cœur net. Ils ont recruté 22 jeunes hommes âgés de 18 à 25 ans. Onze étaient des coureurs de fond de haut niveau. Les autres n’étaient pas considérés comme des sportifs. Tous ont passé des examens d’IRM fonctionnelle au repos. Les chercheurs ont observé les connexions dans le réseau du mode par défaut (MPD), le réseau cortical frontopariétal et le réseau moteur.

Une connectivité renforcée entre certaines zones

Les résultats leur permettent de constater une connexion renforcée entre le réseau cortical frontopariétal et d’autres régions souvent associées avec la mémoire de travail et d’autres fonctions d’exécution. « Cela suggère que la course d’endurance peut mobiliser les fonctions cognitives exécutives au point d’augmenter la connectivité dans les réseaux associés », analysent-ils. Ils relèvent aussi une corrélation négative entre le MPD et des régions associées au contrôle de la motricité, aux fonctions somatosensorielles et aux capacités d’associations visuelles. Plus l’activité du premier baisse, plus celle des autres augmente. « Cette relation est définie comme généralement bénéfique pour les performances cognitives, ce qui suggère que les régions corrélées négativement observées ici sont mobilisées pendant la course. »

Une avancée pour la recherche sur le vieillissement cérébral

« Pour la première fois, nos résultats démontrent des différences claires dans la connectivité fonctionnelle à l’état de repos entre les athlètes coureurs de fond et les non-athlètes du même âge », concluent les auteurs de l’étude. Pour eux, ces différences peuvent être le résultat de la mobilisation cognitive demandée par la course de longue distance combinée avec l’exercice. « Ces différences pourraient améliorer les performances athlétiques en rendant plus efficaces les actions motrices et cognitives », avancent les chercheurs. « La mobilisation des facultés cognitives exigée par l’endurance pourrait en outre améliorer les performances dans les activités autres que sportives », ajoutent-ils. Ces effets de l’exercice sur le cerveau des jeunes adultes devraient être étudiés dans le cadre de travaux sur le vieillissement cérébral et la prévention des risques de maladies neurodégénératives associées, concluent-ils. Plusieurs études avancent en effet que la pratique du sport pourrait retarder la dégénérescence du cerveau.

Auteurs

Jérome Hoff

Rédacteur en chef adjoint BOM Presse Clichy

Voir la fiche de l’auteur

Bibliographie

  1. Raichlen DA, Bharadwaj PK, Fitzhugh MC, Haws KA, Torre G-A, Trouard TP and Alexander GE, « Differences in Resting State Functional Connectivity between Young Adult Endurance Athletes and Healthy Controls », Frontiers in Human Neurosciences, 10, n° 610, 2016, doi: 10.3389/fnhum.2016.00610. Site consulté le 4 janvier 2017
  2. Yogev-Seligmann, G., Hausdorff, J. M., and Giladi, N., « The role of executive function and attention in gait », Movement Disorder, vol. 23, p. 329–342, doi: 10.1002/mds.21720. Site consulté le 4 janvier 2017.

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