Le 16 octobre, les Journées francophones de radiologie (JFR) ont organisé une session intitulée « Points de vue croisés sur la coopération entre radiologues libéraux et hospitaliers ». Jean-Pierre Tasu, radiologue au CHU de Poitiers et Éric Chavigny, radiologue libéral à Dax, ont échangé sur les caractéristiques de chaque mode d’exercice, sur ce qui les rapproche, et sur les manières dont ils coopèrent.
L’hôpital public manque d’attractivité
De ce dialogue, il ressort tout d’abord que les cabinets libéraux et les hôpitaux partagent de nombreuses caractéristiques. Parmi celles-ci : le manque de radiologues, des contraintes financières et des difficultés pour assurer la permanence des soins (PDS). Côté public, Jean-Pierre Tasu pointe le manque d’attractivité de l’hôpital. « Les radiologues perdent le contrôle de l’organisation des services au profit des directions depuis quelques années, déplore-t-il. Mais le problème très sérieux de l’hôpital public, c’est la PDS, car l’activité a beaucoup augmenté. Il y a aussi des soucis de rémunération. »
Le privé manque d’argent et d’imagerie lourde
Pour le secteur privé, la grande problématique reste l’accès aux équipements lourds. « Il est restreint pour le libéral, indique Éric Chavigny, radiologue à Dax (40). Nous avons seulement un accès à une ou deux demi-journées d’imagerie en coupe par semaine. Quand les autorités nous parlent de pertinence, nous répondons qu’il faut du matériel. C’est ce que l’ARS a du mal à comprendre car elle a aussi des objectifs quantifiés. » À cela s’ajoute une forte pression tarifaire; « On nous demande encore un plan d’économies de 180 millions d’euros sur trois ans », se désole le médecin. « Nous n’avons donc pas tant de différences que ça, note Jean-Pierre Tasu. Il faut se demander quels sont nos véritables objectifs. Est-ce qu’il nous faut plus de machines ? Plus de radiologues ? Comment organiser la PDS ? Qui doit l’assurer ? »
Les coopérations qui fonctionnent
Face à ces difficultés, les radiologues font valoir leur rôle dans le parcours de soins. « Les demandes de la population sont croissantes et le radiologue est indispensable, quoi qu’on en dise », estime Éric Chavigny. La confraternité et les coopérations sont d’autres atouts de la profession. « Les membres du G4 communiquent bien ensemble. Les coopérations existantes entre le public et le privé sont de bons exemples », souligne-t-il.
Des PIM qui tardent à se concrétiser
Ces coopérations sont aussi à l’œuvre dans les projets de plateaux d’imagerie mutualisés (PIM), même s’ils tardent à se concrétiser. « Il n’y a pas d’organisation juridique, explique Jean-Pierre Tasu. Ce n’est pas facile à monter et l’ARS ne nous aide pas. Les privés peuvent craindre qu’on leur impose une organisation et les hospitaliers ont peur de rentrer dans un système libéral, avec le côté négatif du mot. À mon sens, il faudrait plutôt entendre « liberté », mais chacun le comprend comme il veut. » Pour sa part, Éric Chavigny estime que le PIM « n’est pas la solution unique ». « Il a tendance à orienter vers une unité de lieu mais l’idée est que, sur un projet médical commun, il puisse y avoir aussi une multiplicité de sites avec des activités complémentaires », conclut-il.
L’ARS propose une harmonisation sur les équipements lourds
Les deux intervenants ont par ailleurs évoqué les particularités de la région Nouvelle-Aquitaine. Concernant le nombre et la localisation des équipements lourds, Jean-Pierre Tasu indique que l’Agence régionale de santé (ARS) a proposé une harmonisation à l’échelle de la nouvelle région, en fonction des bassins de population. « Cela semble logique mais certaines nouvelles applications sont hors-cadre, remarque-t-il. Par exemple, nous ne savons pas comment classer le scanner interventionnel. De plus, l’ARS ne tient pas toujours compte du nombre de médecins. Ça ne la dérangerait pas de mettre un scanner dans un bassin de population où il n’y a pas de radiologue pour le faire tourner. »
Des décisions prises sans consultation des radiologues
Concernant l’organisation de l’offre de soins, le principal désavantage de la Nouvelle-Aquitaine, estime Jean-Pierre Tasu, est l’étendue de son territoire. « En superficie, la région est plus grande que la Belgique, indique-t-il. Ce n’est pas facile à gérer. » Autre difficulté : l’ARS locale est « globalement assez peu ouverte à la discussion » selon l’intervenant, qui regrette que certaines décisions soient prises « sans aucune concertation ». « Il a ainsi été décidé que la TEP-IRM serait installée à Bordeaux. Pourquoi Bordeaux ? On ne sait pas, s’étonne-t-il. Il y a une hégémonie de l’ARS de Bordeaux qui peut être mal vécue par les gens qui sont éloignés. »
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