Lors des Journées francophones de radiologie d’octobre 2016, Jean-Charles Leclerc, radiologue à l’imagerie du triangle à Saint-Dizier (52) et secrétaire général de la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR), a abordé la question des événements indésirables qui peuvent survenir lors des actes d’imagerie utilisant des rayonnements ionisants, et des moyens à mettre en œuvre pour les éviter.
Élaborer et suivre des procédures
« Tout d’abord, entame-t-il, il faut évaluer les risques et établir une cartographie des évènements qui peuvent survenir, car nous ne savons prévenir que ce que nous connaissons. »
L’irradiation d’une femme enceinte
La radioprotection des femmes en âge de procréer doit être une des préoccupations majeures. L’irradiation d’une femme enceinte est un évènement indésirable potentiellement grave. « L’interrogatoire systématique des femmes est fondamental à chaque étape de la prise en charge », souligne Jean-Charles Leclerc. En cas d’irradiation accidentelle d’une femme enceinte, « il est très important d’avoir des procédures de conduite à tenir préétablies et d’évaluer le risque sans le surestimer pour ne pas avoir une attitude inappropriée quant à la poursuite de la grossesse », insiste le radiologue.
L’erreur de patient
L’erreur de patient peut être dramatique en radiothérapie. Pour l’éviter, le service doit mettre en œuvre des mesures d’identitovigilance.
L’exposition des travailleurs
Les travailleurs sont eux aussi concernés par les événements indésirables en imagerie médicale. Ils peuvent être victimes d’une exposition ou d’une situation non ou mal maîtrisée. « Les postes doivent être adaptés par la médecine du travail, notamment pour les manipulatrices enceintes. Il faut faire particulièrement attention aux intervenants extérieurs et ne pas leur laisser un accès libre aux salles », conseille Jean-Charles Leclerc.
Optimiser les pratiques
De bons outils
Le matériel doit être récent et faire l’objet de maintenances régulières. Des contrôles qualité internes et externes doivent veiller au bon fonctionnement des équipements.
Surveiller la dose
Les professionnels doivent suivre les doses et vérifier leurs pratiques pour les optimiser. « Ils doivent au moins faire le recueil réglementaire des doses, sans oublier l’analyse des niveaux de référence diagnostiques [1] (NRD) », poursuit Jean-Charles Leclerc. Pour atteindre cet objectif, « le développement des logiciels de suivi de doses ou Dosimetry Archiving and Communication System (DACS) est fondamental et précieux », estime l’intervenant. Ce système permet d’analyser a posteriori les doses reçues et de cartographier ses pratiques pour ensuite les optimiser. « Dans mon institut, toutes les semaines, nous reprenons les cinq examens les plus irradiants et nous les analysons pour trouver une solution pour un prochain cas semblable. Il existe aussi un système de veille. Les logiciels permettent de définir un seuil et une alarme se déclenche lors de son dépassement. Cela permet de sensibiliser immédiatement l’équipe et d’éviter que l’erreur se produise pour les examens suivants, ou de repérer un problème matériel », décrit Jean-Charles Leclerc.
En radiologie interventionnelle
Développés pour le diagnostic, les DACS ont aussi un rôle fondamental pour la radiologie interventionnelle. Ils permettent de définir un seuil de référence local de dose, d’évaluer les doses moyennes par procédure et ainsi de mettre en place un niveau de seuil pour optimiser ces dernières. « Il faut repérer les patients à risque durant la consultation réalisée avant le geste de radiologie interventionnelle, identifier les procédures à risque et optimiser ses pratiques en déterminant la cadence des images, le champ de vue, etc. Il faut suivre la dose pendant l’examen et le patient sur le plus long terme pour ne pas méconnaître la survenue éventuelle de complications », préconise Jean-Charles Leclerc. La Haute Autorité de santé a édité un guide de recommandations pour la radiologie interventionnelle. Il est en ligne sur son site internet [2].
Les médecins doivent s’engager
Pour que cette démarche d’optimisation de la qualité aboutisse, l’engagement des médecins est fondamental. « Pour tous les examens, il faut établir des protocoles d’acquisition, notamment pour ceux qui concernent le pelvis et les enfants. Il faut que tout le monde les connaisse, il faut les diffuser, former le nouveau personnel et faire attention aux utilisateurs occasionnels, pas toujours rodés aux équipements et à la mise en œuvre des protocoles », reprend Jean-Charles Leclerc. La FNMR a créé un certificat de reconnaissance de la qualité des prestations des cabinets et services d’imagerie médicale, baptisé Labelix [3] « Il reprend toutes les obligations réglementaires et, grâce à la démarche qualité mise en œuvre, permet d’organiser la prise en charge du patient, les déclarations, analyses, corrections et la prévention ainsi que le suivi des évènements indésirables dans une logique de gestion des risques. Labelix est une démarche de management des risques. Vous identifiez les risques au préalable, vous les intégrez dans la démarche qualité ainsi que vos exigences à respecter pour éviter leur survenue des événements indésirables », décrit Jean-Charles Leclerc.
Vers une assurance qualité obligatoire
L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) travaille à la mise en place d’une assurance qualité obligatoire en imagerie dans le domaine de la radioprotection. La directive Euratom 2013 [4] a été transcrite dans le Code de la santé publique début 2016. « L’ASN et le Conseil professionnel de la radiologie française (G4) ont commencé à travailler pour mettre en place cette démarche qualité, basée sur la norme ISO 9001 en s’appuyant sur la démarche qualité déjà obligatoire en radiothérapie. Fin 2017, le décret devrait paraître pour une mise en application dans les mois qui suivront », conclut Jean-Charles Leclerc.
Discussion
Aucun commentaire
Commenter cet article