L’ordinateur plus fort que le radiologue ? La question s’est posée plus d’une fois lors du dernier Congrès européen de radiologie (ECR). Cette édition, qui s’est tenue à Vienne (Autriche) du 1er au 5 mars, a en effet consacré plusieurs sessions à l’émergence de l’intelligence artificielle. Le 1er mars, des radiologues américains – leur pays était l’un des « invités » de cet ECR – ont présenté la technologie du deep learning ou « apprentissage profond », qui reproduit dans des systèmes informatiques le fonctionnement du cerveau humain grâce à des réseaux de neurones artificiels. « Le deep learning consiste à intégrer de grandes quantités de données dans plusieurs couches de traitement permettant d’obtenir une compréhension hiérarchique des concepts inhérents à ces données, explique Keith Dreyer, radiologue au Massachusetts General Hospital de Boston. Au fond, c’est ce que fait le cerveau humain tous les jours. »
« D’ici cinq ans, le deep learning fera mieux qu’un radiologue »
Interrogés sur la capacité des ordinateurs à remplacer les radiologues, plusieurs intervenants, tout au long du congrès, n’ont pas manqué de citer la formule choc du père du deep learning, Geoffrey Hinton : « Il faudrait arrêter de former des radiologues dès maintenant, déclarait-il lors d’une conférence à Toronto en octobre 2016. Il est évident que d’ici cinq ans le deep learning fera mieux qu’un radiologue, car la technologie sera capable d’acquérir beaucoup plus d’expérience. »
Avant tout un outil à exploiter
Confrontés à cette annonce, les professionnels de l’imagerie ont voulu faire valoir leurs arguments. L’intelligence artificielle est-elle vraiment une menace ? Pour Keith Dreyer, c’est avant tout un outil à exploiter : « La question qui nous intéresse est de savoir s’il est possible de programmer des ordinateurs au deep learning en radiologie et la réponse est oui. L’intelligence artificielle peut nous aider à améliorer la qualité de nos examens. »
La valeur ajoutée du radiologue comme nouvel enjeu
Aujourd’hui, le deep learning est utilisé pour la reconnaissance faciale et vocale, pour traduire des langues, pour conduire des voitures, pour aider au diagnostic médical… et les possibilités semblent illimitées. Face au déferlement d’innovations, Keith Dreyer tente une comparaison pour illustrer l’importance du facteur humain dans l’équation : « On fabrique maintenant des voitures qui se conduisent toutes seules, note Keith Dreyer. À l’origine, elles ont été conçues sans volant, mais qui voudrait monter dans une voiture sans volant ? C’est la même chose en radiologie : qui voudrait confier sa santé uniquement à un système informatique ? » Avec l’émergence de l’intelligence artificielle, c’est donc un nouvel enjeu qui se dessine, celui de la valeur ajoutée du radiologue.
Promouvoir une meilleure relation médecin-patient
Dans cette optique, le Collège américain de radiologie (ACR) a créé la campagne « Imaging 3.0 » pour redéfinir le rôle du radiologue au sein du système de santé et lui garantir une plus grande visibilité. « Le but est de positionner le radiologue en tant que responsable de l’imagerie et membre à part entière de l’équipe de prestation de soins », déclare Geraldine McGinty, vice-présidente du conseil exécutif du Collège américain de radiologie. De son côté la Société nord-américaine de radiologie (RSNA) a lancé la campagne « Radiology Cares » pour promouvoir une meilleure relation médecin-patient : « La relation avec le patient est la base sur laquelle repose la place du médecin dans notre société, remarque Richard Ehman, président de la RSNA. Pourtant, cette relation est faible, voire inexistante en radiologie. L’un des objectifs de cette campagne est d’organiser la pratique radiologique pour servir au mieux les intérêts de nos patients. »
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