Docteur Imago / Début 2017, l’UNCAM a décidé de baisser les tarifs de certains actes réalisés par les radiologues, pour opérer notamment des économies, provoquant le mécontentement des radiologues. Qu’en pensez-vous ?
Benoît Hamon / Aucune profession, la vôtre pas plus qu’aucune autre, ne souhaite de baisse de tarif. Mais en radiologie, les progrès de la technologie entraînent des baisses de coûts et/ou des gains de productivité. Et avec des taux historiquement bas, le coût financier de vos investissements est également à la baisse. Il n’est donc pas illogique que les caisses veuillent partager avec votre profession une part de la baisse de vos coûts de production.
Ajoutons qu’avec 189 770€/an de BNC moyen en 2011, les radiologues se situent tout en haut de l’échelle des rémunérations des médecins libéraux avec un différentiel élevé et croissant avec ceux des spécialités essentiellement cliniques. Un niveau de rémunération qui n’est pas sans relation avec l’attractivité de votre spécialité lors des ECN ou avec le fait qu’un nombre important de radiologues hospitaliers se dirigent vers l’exercice libéral.
D. I. / Le taux d’équipement en IRM en France ainsi que les délais d’attente pour passer un tel examen inquiètent les professionnels de santé en imagerie médicale. Le système d’autorisation pour les équipements lourds en imagerie médicale doit-il évoluer, dans son concept même et/ou son application ?
B. H. / Il est exact que notre taux d’équipements lourds d’imagerie a été notablement en retard sur celui de nos voisins. Mais ce retard s’est en bonne partie résorbé. Et en contrepartie, notre parc est plus récent et donc plus moderne et plus productif. Il est d’ailleurs plus intensément utilisé que chez nos voisins.
S’agissant d’investissements coûteux et durables qui, en dernière analyse, sont quasi totalement financés par les cotisations sociales et qui doivent non seulement répondre à des besoins, mais être aussi également répartis sur le territoire que possible, on voit mal comment échapper à un système d’autorisation préalable. Par contre, les critères de choix comme le type, le nombre et la localisation des appareils autorisés, relèvent d’une négociation dont les modalités peuvent être rediscutées. Et se faire bien sûr en toute transparence à l’abri des pressions de toutes natures.
D. I. / Les radiologues souffrent, comme les autres médecins, d’une pénurie démographique. Comptez-vous agir pour pallier ce problème ?
B. H. / La situation démographique actuelle est le résultat d’un malthusianisme absurde et à courte vue de gouvernements de droite comme de gauche, mais aussi de syndicats médicaux qui avaient fait écrire dans la convention « qu’il y avait 20 000 médecins de trop ». Globalement, compte tenu de la durée des études, il n’y a pas de solutions miracles ou immédiates. Mais avec un numerus clausus proche de 8000 à l’entrée de l’internat, le nombre des « arrivées » va rapidement égaler celui des « sorties ». Et à terme, des promotions de 8000 par an et sur la base minimale de 30 ans d’exercice, cela fait 2400 000 médecins, soit un peu plus qu’actuellement.
S’agissant spécifiquement des radiologues : 7 119 sont en activité, dont 1792 ont plus de 60 ans (chiffres CNOM 2015). Le nombre de départs devrait donc avoisiner 360/an dans les 5 prochaines années. Le nombre de postes ouverts aux ECN est de 244. Le déficit existe, mais la situation est notablement plus difficile dans d’autres spécialités. Si l’on veut favoriser une spécialité, il faut diminuer d’autant une ou plusieurs autres.
D. I. / La loi créant les groupements hospitaliers de territoire prévoit une mutualisation des moyens techniques et humains en imagerie médicale. Cela va-t-il dans le bon sens ?
B. H. / Bien sûr, la mutualisation est d’autant plus nécessaire que les appareillages sont lourds coûteux et rares. Il faut donc qu’ils soient utilisés au mieux.
D. I. / 47 % des postes de radiologues exerçant à l’hôpital ne sont pas pourvus, d’après plusieurs représentants de la profession. Comment imaginez-vous agir pour garder les professionnels dans le secteur public ?
B. H. / Cela constitue en effet un véritable problème. L’explication (peut-être pas la seule, mais sans doute la principale) tient à la différence considérable entre les revenus de praticiens hospitaliers, dont la rémunération est identique à celle de collègues de statuts équivalents dans les autres disciplines, et ceux des radiologues libéraux qui, de plus, se constituent un « capital » non négligeable. Cette situation relativise les plaintes concernant la situation difficile de la radiologie libérale. Si elle allait si mal que cela, les radiologues hospitaliers ne seraient pas si nombreux à se diriger vers l’exercice libéral.
D. I. / Les médecins libéraux critiquent la mise en place du système de tiers payant généralisé. Comment voyez-vous leur place dans le système de santé ?
B. H. / Les radiologues perçoivent plus de 90 % de leurs honoraires en « tiers-payant ». Ils n’en sont pas moins des « libéraux » qui exercent en toute indépendance. Ils ne demandent pas à revenir en arrière sur cette situation qui solvabilise leur patientèle et garantit le paiement de leurs actes. Échanger sur leur expérience avec leurs confrères plus réticents améliorerait la situation.
D. I. / La radiologie interventionnelle fait l’objet de nombreuses avancées en termes de traitement mini-invasif pour les patients. D’un autre côté, les radiologues déplorent le manque de remboursement dans cette spécialité. Favoriserez-vous le développement de cette discipline ? Avec les radiologues ?
B. H. / La radiologie interventionnelle est effectivement une voie d’avenir en plein développement. Comme pour toutes les innovations se pose la question de leur nomenclature et de leur tarification. Nous ne doutons pas qu’elle sera favorisée à l’avenir.
D. I. / Le décret d’actes des manipulateurs en électroradiologie médicale prévoit la délégation possible de l’échographie par les médecins. Cela doit-il être encouragé ? Dans quel but ?
B. H. / La priorité, c’est évidemment l’absolue nécessité de garantir la qualité des soins due aux patients.
D. I. / Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
B. H. / Votre discipline a été, et continue à être, un des facteurs essentiels des progrès médicaux d’abord dans le domaine diagnostic, mais aussi désormais thérapeutique. Les patients en sont bien conscients. Alors, même s’il peut y avoir des problèmes ou des difficultés ponctuelles, nous sommes certains du très bel avenir qui sera celui de votre discipline et des professionnels qui l’exercent.
Discussion
Aucun commentaire
Commenter cet article