Le 19 avril 1906 à 14 heures, alors qu’il traverse la rue Dauphine (Paris), Pierre Curie glisse sur la chaussée mouillée et meurt écrasé par un lourd camion hippomobile. Marie Curie, son épouse, qui n’apprend la nouvelle que 5 heures plus tard, reste longtemps affectée par cet événement tragique. Ses travaux de recherche s’en trouvent significativement ralentis : même si elle parvient à isoler le premier gramme de radium pur pour définir une nouvelle unité, le Curie, son second prix Nobel et son activité de recherche sont occultés, en 1911, par le scandale de sa liaison avec Paul Langevin puis par une maladie rénale qui nécessite une opération chirurgicale et une longue convalescence. Affaiblie, diminuée, presque discréditée dans certains milieux, Marie Curie est en pleine dépression quand la Première Guerre mondiale éclate en juillet 1914 [1]. Pourtant, les événements géopolitiques et surtout deux hommes hors du commun, Antoine Béclère et Claudius Regaud, vont réveiller en elle une ex
L’imagerie médicale dans la Première Guerre mondiale
Des pionniers des radiations dans la Grande Guerre
Au côté des figures emblématiques de Claudius Regaud, qui organisa les hôpitaux du front, d’Antoine Béclère, qui mit en place la radiologie de guerre, et de Marie Curie, qui s’investit dans le développement de voitures radiologiques, cet article rappelle le parcours de deux héros de la Grande Guerre, promoteurs des radiations tombés dans l’oubli : Étienne Destot, inventeur des premiers clichés radiologiques de fractures ostéoarticulaires, mort pour la France en 1918, et Léon Bouchacourt, créateur de la bonnette qui permet de guider les gestes du chirurgien sous radioscopie.
Dans l'ombre de Marie Curie (photo), de Claudius Regaud ou d'Antoine Béclère, des radiologues de la première heure tels que Léon Bouchacourt et Étienne Destot ont mis leurs compétences au service des soldats français. D. R.
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Auteurs
Nicolas Foray
Directeur de recherche INSERM
Unité INSERM UA8 « Radiations : Défense, Santé, Environnement »
Centre Léon-Bérard
Lyon
Bibliographie
- Himbert M.-N., Marie Curie. Portrait d’une femme engagée. 1914-1918, Paris, Actes Sud, 2014.
- Pallardy G., Mabille J.-P. (1999), « À la mémoire d’Antoinette Béclère, gardienne admirable de l’oeuvre de son père », J Radiol, 1999, vol. 80, n° 6, p. 600-603. DOI : JR-06-1999-80-6-0221-0363-101019-ART17.
- Pallardy G., Pallardy M.-J., Wackenheim A. Histoire illustrée de la radiologie, Paris, Éditions Roger Da Costa, 1989.
- Curie E., Madame Curie, Paris, Gallimard, 1938.
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- Regaud C., Service de santé militaire. Centre d’études et d’enseignement médico-chirurgical de Bouleuse. Leçons de chirurgie de guerre, publiées sous la direction de Cl. Regaud,… par MM. Guillain, Jeanbrau, Lecène, Lemaître, Leriche, Magitot, Mocquot, Nogier, Okinczye, Piollet, Policard, Roux-Berger, Tissier, Paris, Masson, 1918.
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- Bouchacourt L., Thèse de médecine : De l’exploration des organes internes à l’aide de la lumière éclairante et non éclairante ; endoscopie par les rayons de Röntgen, université de Paris, Paris, France, 1898.
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- Destot É., « Clichés photographiques pris avec la méthode de Roentgen. Comptes-Rendus de la Société des Sciences Médicales de Lyon. Séance du 5 février 1896 », Lyon Médical, 1896, vol. 81, p. 211-212.
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- Gallois E., Aigrot G., Japiot P., « Nécrologie d’Étienne Destot », Lyon Chirurgical, vol. 16, p. 105-134.
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