Droit

L’utilisation de l’imagerie cérébrale dans le domaine judiciaire

Les images cérébrales sont de plus en plus souvent utilisées en justice. Certaines de ces utilisations peuvent nourrir un imaginaire « neurodéterministe » difficilement compatible avec les principes juridiques. En France, la rédaction en 2011 d’un article du Code civil visant spécifiquement les usages de telles images n’a pas mis fin aux discussions.

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Le 20/06/19 à 15:00, mise à jour aujourd'hui à 15:06 Lecture 10 min.

La loi ne fait pas de distinction entre l’imagerie anatomique et l’imagerie fonctionnelle, et n’interdit aucune utilisation en contexte d’expertise judiciaire. © AJEL sur Pixabay.com

Sous l’intitulé de « neurodroit », traduction du concept étasunien de neurolaw, un nouveau champ de recherche s’est ouvert pour étudier les transformations du droit sous l’effet de l’utilisation de l’imagerie cérébrale et de la montée en puissance des conceptions « neurodéterministes » [1]. Ces dernières semblent, en effet, gagner du terrain, assimilant la personne à l’individu « neurobiologique » selon le raisonnement suivant : les choix et les comportements humains sont des activités cognitives et le siège de la cognition est le cerveau. Dès lors, l’étude scientifique du cerveau est la plus à même de nous offrir des analyses pertinentes pour toutes les activités humaines. Ceci est résumé dans la formule « Je (le sujet, la personne ou l’individu) suis mon cerveau »  [2-4].

De multiples applications juridiques

Cette approche se décline sur le terrain juridique de plusieurs manières : depuis la prise en considération de la maturité cérébrale pour déterminer la responsabilité des mineurs,

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Notes

1. Après une affaire criminelle jugée en 2008 par le tribunal de Pune et largement commentée, la Cour suprême de l’Inde a retenu en 2010 le caractère anticonstitutionnel d’un usage à charge des techniques d’imagerie cérébrale pour la détection de mensonge.

Auteurs

Sonia Desmoulin-Canselier

Chargée de recherche CNRS

UMR 6297

Droit et changement social

Bibliographie

  1. Chamak B. et & Moutaud B. (dir.), Neurosciences et société : Enjeux des savoirs et pratiques sur le cerveau, Armand Colin, Paris, 2014.
  2. Ehrenberg A., « Se définir par son cerveau », Esprit, janvier 2015, vol. 1, n° 68, p. 68-81. DOI : 10.3917/espri.1501.0068.
  3. Forest D., Neuroscepticisme, Éditions Ithaque, Paris, 2014.
  4. Illes J. & Sahakian B. J. (ed.), The Oxford Handbook of Neuroethics, Oxford University Press, New-York, 2011, p. 151-226.   
  5. US Supreme Court, Roper vs. Simmons, 543 U.S. 551 (2005).
  6. Byk C., « Neurosciences et administration de la preuve pénale devant les juridictions des États-Unis », Médecine & Droit, 2011, vol. 2011, no 106, p. 59-63. DOI : 10.1016/j.meddro.2010.10.004.
  7. Gkotsi G. M., Moulin V., Gasser J., « Les neurosciences au Tribunal : de la responsabilité à la dangerosité, enjeux éthiques soulevés par la nouvelle loi française », L’encéphale, octobre 2015, vol. 41, n° 5, p. 385-393. DOI : 10.1016/j.encep.2014.08.014.
  8. http://www.leprogres.fr/rhone/2014/06/08/monsieur-le-juge-ce-n-est-pas-lui-c-est-son-cerveau; https://www.corsematin.com/article/corse/pietrosella-un-resultat-dirm-qui-pese-sur-la-poursuite-de-cette-affaire.9172.html. Sites consultés le 18 juin 2019.
  9. Greely H. T., « Neuroscience and Criminal Responsibility: Proving ‘Can’t Help Himself’ as a Narrow Bar to Criminal Liability », in Freeman M. (ed.), Law and Neuroscience: Current legal issues, vol. 13, Oxford University Press, 2011, p. 61. DOI : 10.1093/acprof:oso/9780199599844.003.0005.
  10. Yurkiewicz I., « « My Brain Made Me Do It »: Can Neuroimaging Undermine the Case for Criminal Punishment? », Penn Bioethics Journal, 2010, vol. 6, n° 2, p. 14-15. https://issuu.com/pennbioethicsjournal/docs/v6i2/15. Site consulté le 18 juin 2019.
  11. Morse S. J., « Brain overclaiming syndrome and criminal responsibility: a diagnostic note », Ohio State Journal of Criminal Law, 2006, Vol. 3, p. 397.
  12. Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 nov. 2001, pourvoi n° 01-86.467. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000007068863. Site consulté le 18 juin 2019.
  13. Cour européenne des droits de l’homme, Mantovanelli contre France, 18 mars 1997, n° 21497/93. https://juricaf.org/arret/CONSEILDELEUROPE-COUREUROPEENNEDESDROITSDELHOMME-19970318-2149793. Site consulté le 18 juin 2019.
  14. Comité consultatif national d’éthique, Avis 129 « Contribution du CCNE à la révision de la loi de bioéthique 2018-2019 », 18 septembre 2018, p. 86 et p. 93. https://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/avis_129_vf.pdf. Site consulté le 18 juin 2019.
  15. Conseil d’État, Révision de la loi de bioéthique : quelles options pour demain ?, Etude à la demande du Premier ministre, 28 juin 2018, p. 188-189. https://www.ladocumentationfrancaise.fr/docfra/rapport_telechargement/var/storage/rapports-publics/184000450.pdf. Site consulté le 18 juin 2019.

Discussion

2 commentaires

Commenter cet article
  1. Hervé LecletCe serait bien de savoir qui a rédigé cet intéressant article "big-brotherien" !
    Il y a 6 ans
    1 réponse
    1. Jérôme HoffBonjour, Oubli corrigé. Merci pour votre vigilance. Bien cordialement.
      Il y a 6 ans

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