Gouvernance des entreprises

L’organisation des pouvoirs : un défi majeur des groupes libéraux d’imagerie médicale

Comme les autres entreprises, les groupes médicaux d’imagerie médicale doivent mettre en place des outils efficaces d’exercice du pouvoir et de prise de décision. Une tâche qui peut devenir un casse-tête et réclame une définition transparente et précise des responsabilités de chacun.

Le 28/12/16 à 16:00, mise à jour aujourd'hui à 15:12 Lecture 6 min.

Par nature, une entreprise libérale, composée de plusieurs associés, est source de difficultés intrinsèques de gouvernance et de management. Domaine public pixabay.com

La question de l’organisation de la gouvernance, des difficultés de management et de maîtrise rigoureuse des fonctions de pilotage et de gestion ne sont pas spécifiques à l’imagerie libérale. Toutes les entreprises se la posent, quel que soit leur secteur d’activité. Plus une entreprise grandit, plus sa gouvernance et son management doivent être formalisés et structurés. En imagerie médicale libérale, l’acuité de cette question est directement liée à la nature intrinsèque libérale des groupes, à leur taille et à leur structure. Ces trois paramètres ont un impact direct sur les modes d’organisation et sur la prise des décisions. Selon le vieil adage « la fonction crée l’organe ». En grandissant, les entreprises libérales d’imagerie médicale doivent donc formaliser plus et mieux leurs structures d’administration et de pilotage.

Pourquoi renforcer l’organisation ?

Parce que les entreprises grandissent

Pour de multiples raisons, les groupes libéraux d’imagerie grandissent inexorablement. Leur croissance et leur taille, les organisations toujours plus complexes, l’éternelle question de la prise de décision efficace, le poids de l’environnement et des contraintes, la pression économique et la baisse de la rentabilité, la recherche de performance et d’autres facteurs encore, imposent de réviser les organisations archaïques et les rapports de forces bien établis. On ne peut plus piloter aujourd’hui un groupe d’imagerie associant de nombreux médecins radiologues et des dizaines de salariés (c’est-à-dire une véritable PME) comme un petit cabinet de 2 ou 3 radiologues avec quelques manipulateurs et quelques secrétaires. En un mot, les entreprises modernes d’imagerie médicale doivent aujourd’hui s’interroger sur l’efficacité et la formalisation de leurs structures de décision et de gestion. Cette réflexion les amènera souvent à réviser et renforcer leur gouvernance et leur organisation car le niveau de maturité managériale des entreprises d’imagerie est très variable.

Parce que la gestion est complexe

L’administration moderne et le pilotage performant d’une entreprise d’imagerie médicale couvrent plusieurs vastes domaines et concernent de nombreuses fonctions et personnes internes ou externes au groupe d’imagerie : médecins radiologues associés (et actionnaires), médecins radiologues administrateurs (également actionnaires), directeur administratif et financier (DAF), expert-comptable, commissaire aux comptes, juriste et avocat-conseil. Des intérêts, parfois divergents, sont en jeu : intérêts communs du groupe contre intérêts individuels des radiologues copropriétaires, approche économique contre approche patrimoniale, développement contre stabilisation et renforcement, vision métier contre vision entrepreneuriale.
Enfin, et ce n’est pas la moindre des raisons, quand il prend une décision concernant son entreprise, chaque médecin radiologue tient un raisonnement double qui est intrinsèquement lié à son statut dual dans le groupe d’imagerie. D’une part, il est médecin en activité et producteur d’actes d’imagerie. C’est d’ailleurs sa raison d’être. Il a ainsi une approche métier, orientée sur la qualité des actes et de la prise en charge des patients, en voulant avoir à sa disposition un outil de travail adapté et performant. D’autre part, il est actionnaire de l’entreprise et directement concerné par le résultat économique, la valorisation de ses parts et la pérennisation de son groupe d’imagerie. Il tient donc également un raisonnement financier et patrimonial.

Organiser les pouvoirs est difficile

Un groupe d’imagerie médicale est une entreprise libérale. Par nature, une entreprise libérale, composée de plusieurs associés, est source de difficultés intrinsèques de gouvernance et de management. C’est dans son ADN. En effet, chaque médecin radiologue associé de la société a vocation à en être codirigeant. Chacun est coresponsable du groupe d’imagerie. Ainsi, il y a autant de dirigeants que d’associés. Il est facile de comprendre que plus il y a de codirigeants, plus la gouvernance est floue et fragile. Or, il n’est plus rare de voir des groupes d’imagerie réunissant 15 ou 20 radiologues associés, voire plus encore. Un principe essentiel de management est d’avoir un dirigeant (et un seul) au sommet de la pyramide hiérarchique et une ligne hiérarchique entre ce dirigeant et le reste de l’entreprise. Un vieux proverbe de la Rome antique ne disait pas autre chose : « Un esclave qui a trois maîtres est un homme libre. » Ces principes ne peuvent pas être respectés dans une entreprise libérale qui repose sur la confraternité et l’égalité de statuts entre associés. Ainsi, de nombreux groupes se posent aujourd’hui de manière aiguë la question suivante : comment organiser la prise de décision, concevoir la direction, le management et la gestion d’une entreprise de taille moyenne avec de nombreux dirigeants concentrés (à juste titre) sur leur activité médicale cœur de métier, qui, sauf exception, ne sont pas formés au management et ne sont pas attirés par ces tâches et ces responsabilités ? Qui va exercer le pouvoir et comment ? Qui va prendre les décisions ? Qui va faire vivre l’entreprise au quotidien et comment ? Qui va contrôler les résultats et la performance de l’entreprise ?

Les acteurs de la gouvernance et du management

L’assemblée des associés

En dehors du cas particulier des sociétés d’imagerie qui n’appartiennent pas aux médecins radiologues, les décideurs, c’est-à-dire les acteurs principaux de la gouvernance et du management, sont les radiologues eux-mêmes, copropriétaires, coactionnaires et coadministrateurs du groupe d’imagerie, réunis en assemblée des associés. Dans de très rares cas, d’autres investisseurs externes sont impliqués. Dans les structures petites et moyennes, les décisions sont prises collégialement lors de réunions d’associés. Encore faut-il définir clairement le mode de prise de décision : à l’unanimité ? à la majorité des deux tiers ? des trois quarts ? à la majorité absolue plus une voix ? autre ?

Le comité de direction

Dans les grands groupes, un « comité de direction » (parfois nommé « directoire ») est élu par les radiologues associés et les représente pour assurer ces fonctions. Ce « comité de direction » assure la gouvernance et le management de l’entreprise d’imagerie. Il nomme et mandate la direction opérationnelle, selon des modalités variables, propres au régime juridique de la société concernée. Il doit rendre compte de ses actes et décisions à l’assemblée des associés.

Les statuts de la société

Ces règles d’organisation sont précisées dans les statuts de la société (et/ou dans le pacte d’associés qui complète les statuts). On y retrouve la description :

  • des organes d’administration, des organes de gestion et des organes de contrôle ;
  • de la composition du comité de direction : en général un nombre limité de radiologues coresponsables, qui assure une représentativité équilibrée de l’ensemble des associés ;
  • du mode d’accession à ces fonctions (nomination ou élection, critères d’éligibilité) ;
  • du périmètre des pouvoirs de direction et de gestion délégués au comité de direction par l’ensemble des médecins associés ;
  • des autres décisions importantes qui nécessitent d’être prises par l’assemblée des associés ;
  • des modes d’adoption des décisions au sein de l’organe de direction et au sein de l’assemblée des associés.

Le « comité de direction » agit sous le contrôle permanent de la communauté des associés coresponsables.

Les fonctions support

En parallèle, il convient de définir les différentes fonctions support placées sous la responsabilité d’un (ou plusieurs) dirigeant(s) clairement identifié(s) qui aura(ront) en charge les secteurs clés du groupe d’imagerie : finances, ressources humaines, qualité, système d’information, gestion des équipements d’imagerie, relations avec les correspondants et les tutelles.

Conclusion

Les entreprises modernes d’imagerie médicale sont confrontées à la mise en œuvre d’outils concrets et pragmatiques d’exercice du pouvoir et de prise de décision. Elles doivent instaurer un système qui couvre la gouvernance, le management, la gestion, la communication et le contrôle. Une organisation transparente doit définir les responsabilités et les tâches de chacun, les règles de prise de décisions, de reporting interne, de communication, de coopération, de rémunération, de supervision. Ces règles s’appliquent à l’ensemble du fonctionnement de l’entreprise.

Auteurs

Hervé LECLET

SANTOPTA Groupe ESPRIMED

Médecin radiologue

Consultant en organisation en imagerie médicale

www.santopta.fr

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