L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la qualité de vie comme « la perception qu’a un individu de sa place dans l’existence, dans le contexte de la culture et du système des valeurs dans lesquels il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. Il s’agit, précise-t-elle, d’un concept très large influencé de manière complexe par la santé physique du sujet, son état psychologique, son niveau d’indépendance, ses relations sociales, ainsi que sa relation aux éléments essentiels à son environnement. » Lors des 30es Rencontres des cadres de radiologie du Grand Sud, organisées mi-septembre 2016 par l’Association française du personnel paramédical d’électroradiologie (AFPPE) à Toulouse, Jean-Noël François, médecin du travail à l’Association régionale pour la sauvegarde de l’enfant, de l’adolescent et de l’adulte (ARSEAA), s’est intéressé à cette notion de qualité de vie appliquée au monde du travail.
Le bien-être au travail : une notion individuelle
« La qualité de vie au travail peut se concevoir comme un sentiment de bien-être perçu collectivement et individuellement, explique-t-il. Elle englobe l’ambiance, la culture de l’entreprise, l’intérêt du travail, les conditions de travail, le sentiment d’implication, le degré d’autonomie et de responsabilisation, l’égalité, un droit à l’erreur accordé à chacun, une reconnaissance et une valorisation du travail effectué. » Aujourd’hui, poursuit-il, les cadres de radiologie n’ont pas toujours les outils pour évaluer un risque psychosocial, un risque professionnel, un stress professionnel, etc., ni la capacité d’intervenir. Car le bien-être au travail est une notion complexe, qui a évolué : « Ce n’est plus uniquement l’absence de pathologie, mais le fait d’être bien dans son travail, ce qui introduit la notion de perception individuelle de situation par rapport à des contraintes de la sphère professionnelle. »
Une donnée difficile à mesurer
Le problème, de cette « individualisation », c’est que nous ne sommes pas tous « issus du même moule », que les réactions ne sont pas toutes similaires dans une situation identique, que les contraintes de vie professionnelle ne sont pas ressenties de la même façon et sont donc difficiles à mesurer. « En 2002, les instances européennes ont inauguré une approche globale du bien-être au travail, en prenant en compte les changements du monde du travail et l’émergence de nouveaux risques, notamment psychosociaux. Le Canada et quelques pays nordiques d’Europe ont commencé à introduire cette notion de bien-être au travail en prévention, mais aussi dans leur législation. Elle passe par la réduction du stress et des risques psychosociaux », rapporte Jean-Noël François.
La clé du bien-être : un travail stimulant
Comment améliorer la qualité de vie au travail ? Pour Nadia Peoc’h, directrice de soins au centre hospitalier du Val d’Ariège, la solution est de « donner un sens » au travail, en favorisant l’autonomie du travailleur : « Le sujet doit avoir la liberté de choisir la manière de faire son travail, avec la capacité d’exercer son jugement. Le travail est utile si le sujet le perçoit ainsi. L’exercice et le développement des compétences offrent un travail stimulant qui mobilise l’intelligence, l’imagination, l’innovation et la créativité pour permettre l’épanouissement du sujet. » Dans cette démarche, estime-t-elle, le cadre joue un rôle primordial.
La reconnaissance est fondamentale
Plusieurs enquêtes ont tenté de cerner le ressenti des professionnels. Une étude menée entre 2012 et 2013 au CHU de Toulouse [1] a évalué la perception de l’implication au travail, les impacts probables des attributs du travail sur la motivation et sa qualité de vie et le regard porté sur les valeurs professionnelles chez 1 538 professionnels de santé, toutes filières de soins confondues. « Pour les participants, l’équipe est un lieu d’entraide de compréhension, de solidarité collective mais aussi d’incompréhension et de division […], constate Nadia Peoc’h. Les réponses des manipulateurs montrent qu’ils souhaitent avant tout être reconnus pour leurs compétences. « Ils ne veulent plus être des agents exécutant des tâches, mais des sujets auteurs et acteurs, des collaborateurs », souligne la directrice de soins. Il faut savoir dire que le manipulateur est utile, qu’il fait du bon travail.
Travailler en confiance
Mylène Coulaud, directrice des soins au CHU de Rennes, a enquêté dans quatre centres hospitaliers universitaires et neuf centres hospitaliers. Elle a distribué des questionnaires aux cadres de santé, cadres supérieurs de santé et directeurs de soins. « Dans l’ensemble, les avis ne sont pas très négatifs sur les questions des conditions de travail et du soutien social, rapporte-t-elle. Les cadres se plaignent d’être interrompus dans leur travail et de faire des heures supplémentaires ni compensées, ni payées. Ils veulent travailler dans une relation de confiance au sein de projets concertés et attendent une communication ouverte et des supérieurs accessibles. » Les résultats relèvent l’importance donnée au soutien dans les difficultés. « Il faut un réel partage, une réelle discussion. Les cadres de santé et cadres supérieurs estiment qu’il faut se réunir pour discuter de la qualité de vie au travail. Il faut créer une relation de confiance pour ne pas avoir peur de parler, avoir peur d’être jugé », conclut l’intervenante.
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