Les nouvelles technologies séduisent ou inquiètent les radiologues. Le 16 octobre dernier, une session des Journées francophones de radiologie (JFR), a voulu faire le point. Parmi les intervenants, Olivier Clatz s’est interrogé sur la performance des algorithmes lors de sa présentation intitulée « Radiologie assistée par ordinateur : buzz ou réalité ? ». Un domaine qu’il connaît bien puisqu’il est le cofondateur de la société Therapixel, spécialisée dans la conception de logiciels pour l’imagerie médicale,
Le CAD en question
Il attaque en pointant le manque de preuves concernant la performance des CAD ou Computer aided detection pour interpréter les examens d’imagerie médicale. « Il y a très peu d’articles qui démontrent ses performances dans un usage de production, note-t-il. En revanche, des gens ont réussi à montrer que cela permet de gagner un peu de temps. Mais du point de vue de la performance, les meilleurs radiologues ne s’améliorent pas avec le CAD », répète-t-il.
La performance des algorithmes
Selon lui, ce sont d’abord les outils qui doivent s’adapter à l’homme en matière de performance. Cette dernière est une question centrale, estime Olivier Clatz, qui rappelle l’impact négatif que peuvent avoir certains outils. « Sur une tache cognitive, si vous donnez à un expert un outil qui est moins performant que lui, sa performance baissera à mesure qu’il l’utilisera, affirme-t-il. On ne peut donc créer un outil utile que lorsqu’on arrive à un niveau de performance qui dépasse les meilleurs experts. »
L’exemple de la biologie
Pour la radiologie, Olivier Clatz entrevoit une « révolution » assez comparable à ce qui s’est passé en biologie. « Il y a une vingtaine d’années, tout était fait à la main, rappelle-t-il. Puis les robots sont arrivés. Aujourd’hui, une grande partie des examens sont réalisés par des robots. Ils écrivent les comptes rendus et les biologistes ne voient qu’un pourcentage faible des examens réalisés, notamment ceux pour lesquels l’algorithme a un indice de confiance plus faible. » La situation devrait évoluer de la même manière en imagerie médicale, « avec des routines qui passent automatiquement sur les images à la sortie d’acquisition, des comptes rendus pré-écrits et des radiologues qui viennent les relire et les reprendre », prédit l’intervenant.
Les peurs de la robotisation
Comme de nombreuses évolutions technologiques au fil des siècles, l’intelligence artificielle n’échappe pas aux scénarios pessimistes lorsqu’elle est envisagée comme une forme de concurrence. « Sur des taches extrêmement analytiques, nous aurons demain des algorithmes plus performants que l’œil humain, confirme Olivier Clatz. Les peurs que peuvent susciter ces algorithmes sont comparables aux peurs qui se sont déjà manifestées par le passé lorsqu’une partie du travail à la chaîne a été robotisée », analyse-t-il.
Absorber une partie des données collectées
Pourtant, sur la question du remplacement des radiologues par des robots, l’intervenant se veut rassurant. « En biologie, aucun emploi n’a disparu. Au contraire, de nouveaux emplois ont été créés, indique-t-il. Lorsque les robots sont apparus, le nombre d’examens a explosé et il y a aujourd’hui plus de biologistes que lorsqu’il n’y avait pas de robots. En imagerie, on assiste à une augmentation constante de la quantité d’informations générées et ce n’est pas près de s’arrêter. Les techniques d’analyse automatiques peuvent permettre d’absorber une partie de cette quantité d’informations. » À ce sujet, l’intervenant souligne que le taux de vacance élevé des radiologues dans le service public pourrait jouer en faveur de l’automatisation. « On manque de radiologues et chacun se retrouve avec de plus en plus d’informations à analyser », rappelle-t-il.
« Nous avons encore un peu de temps devant nous »
Les innovations technologiques font partie intégrante de l’évolution de l’imagerie médicale. Celle qui s’annonce avec l’intelligence artificielle demande encore un temps d’adaptation. « Pour le moment, personne n’a mis au point une performance algorithmique comparable à la performance de l’œil humain, souligne Olivier Clatz. Nous avons donc encore un peu de temps devant nous. »
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