Priscille Bex

« Les médecins doivent se faire conseiller avant de signer avec un financier »

Avocate au barreau de Paris, Priscille Bex conseille aux radiologues d’être avertis sur les diverses implications des montages financiers liés à la financiarisation et insiste sur l’importance du consentement.

Le 20/03/24 à 7:00 Lecture 3 min.

« Les financiers séparent les droits financiers des droits de vote, ce qui leur permet d’avoir 99 % des droits financiers », explique Priscille Bex. D. R.

Docteur Imago / Quel cadre législatif régit la financiarisation en radiologie ?

Priscille Bex / Cela dépend des accords signés et du type de structure déjà existante, mais les financiers, ou bien des tiers qui ne sont pas forcément radiologues, investissent en général dans les sociétés d’exercice libéral (SEL). Pour ces SEL, la règle est que les personnes qui travaillent dans la structure doivent détenir au moins 50 % des droits de vote et diriger la société. Un cas de figure fréquent est que les financiers achètent dans un format qui permet de différencier les participations. Ils séparent les droits financiers des droits de vote, ce qui leur permet d’avoir 99 % des droits financiers. Les droits de vote sont laissés aux médecins pour leur permettre, sur le papier, de voter sur des décisions souvent stratégiques. Mais il y a d’autres documents juridiques, dans le cadre de pacte d’associés entre autres, qui peut comporter des engagements par les médecins de faire valider certaines décisions par le financier. Par exemple, on observe souvent une centralisation au niveau du groupe de l’achat de matériels et de produits après l’arrivée de financiers. Les médecins gérants n’ont pas toujours la charge de négocier ces contrats, mais ça ne veut pas forcément dire qu’ils ne les choisiront pas. Là est la difficulté de savoir ce qui peut potentiellement être imposé ou non aux médecins.

D. I. / Les financiers peuvent-ils influer sur les choix du médecin ?

P. B. / Des financiers qui ne sont pas médecins ne peuvent pas dire à un médecin de faire un scanner plutôt qu’un IRM. En revanche, ils peuvent influencer le choix des machines, ou émettre des souhaits de rentabilité en demandant au médecin de faire tant de patients par heure. Les ingérences sont donc en effet possibles. On ne peut pas vraiment en déterminer les impacts réels, car cela dépend des groupements.

« Les médecins ne doivent pas être forcés ou induits en erreur. »

D. I. / Quels intérêts la financiarisation peut-elle avoir pour les radiologues ?

P. B. / Tous les financiers ne se valent pas ; ce n’est pas forcément quelque chose de négatif. La financiarisation peut avoir un intérêt économique, car c’est quand même souvent un apport de trésorerie important pour certains radiologues qui peuvent avoir du mal à financer des machines plus performantes. Certains apprécient également d’être déchargés d’une partie de la gestion administrative et de pouvoir se concentrer sur l’exercice purement médical. Cela permet aussi à un certain nombre de radiologues qui souhaitent quitter la profession de vendre leur activité, mais cela pose le problème de la transmission à d’autres médecins. C’est sur ce point que beaucoup se plaignent car cela ferme le marché aux médecins.

D. I. / Quel conseil donneriez-vous à des radiologues avant qu’ils ne signent avec un financier ?

P. B. / Il faut absolument qu’ils se fassent conseiller. Si certains médecins vendent leur structure pour partir, d’autres y restent. Ces derniers doivent savoir ce que cela implique de rester. Dans quelle mesure auront-ils encore leur mot à dire ? Qu’est-ce que cela va changer dans leur manière de travailler au quotidien ? Les financiers qui prennent des participations minoritaires vont laisser les médecins maîtres de leur activité mais, le plus souvent, ce n’est pas le cas. Il y a énormément de structures dans lesquelles il y a plusieurs gérants, et lorsqu’un financier arrive, il n’en reste qu’un seul et les autres n’ont plus forcément de pouvoir de décision. Il y a aussi une question du consentement des médecins. Ils ne doivent pas être forcés ou induits en erreur. S’ils ont bien compris quelles sont les conséquences pour eux, alors il n’y a pas d’inconvénient.

Auteurs

Solenn Duplessy

Voir la fiche de l’auteur

Discussion

Aucun commentaire

Laisser un commentaire

Le fil Docteur Imago

09 Mai

16:00

La start-up Chipiron vient de boucler une nouvelle levée de fonds de 15 millions d'euros pour terminer la R & D de sa technologie d'IRM ultra bas champ, rapporte L'Usine digitale. Selon le média, cette levée de fonds permettra notamment de fabriquer un troisième prototype et démarrer des essais cliniques, pour viser une future commercialisation d'abord aux États-Unis, puis en Europe. Il y a deux ans, le cofondateur de Chipiron avait confié à Docteur Imago ses objectifs pour développer une IRM à 1 mT.

13:30

Un nouveau centre d'imagerie médicale a ouvert le lundi 5 mai à Neufchâtel-en-Bray (76), selon le média en ligne actu.fr. Résultant du déménagement d'un cabinet dans de nouveaux locaux, ce changement s'accompagne de l'installation de nouvelles modalités, scanner et IRM.

7:30

La société australienne Telix Pharmaceuticals a annoncé le 29 avril avoir obtenu de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) l'autorisation de mise sur le marché (AMM) en France de son agent de TEP Illuccix®(kit pour la préparation de 68Ga-PSMA-11) pour la détection et la localisation de lésions positives au PSMA chez des patients adultes souffrant de cancer de la prostate (indications précisées dans le communiqué ci-joint).
07 Mai

16:00

La clinique de l’Estrée à Stains (93) s'est dotée d'une IRM à champ ouvert, annonce le groupe Elsan (communiqué).
Docteur Imago

GRATUIT
VOIR